Le projet de gazoduc Nigeria-Maroc (NMGP) est un exemple emblématique de la coopération Sud-Sud, renforçant les liens économiques et politiques entre le Maroc, les pays d’Afrique de l’Ouest et le Nigeria. BKGR a analysé les différents impacts que ce projet structurant aura sur l’économie marocaine.
Il est à rappeler que ce projet vise à favoriser l’intégration régionale et le développement des marchés en stimulant l’émergence d’un marché gazier ouest-africain intégré.
Cela devrait non seulement stimuler le développement économique des pays de transit, mais aussi améliorer leur accès à l’énergie.
En outre, le gaz naturel, en tant que combustible de transition, peut jouer un rôle complémentaire au développement massif des énergies renouvelables telles que le solaire et l’éolien au Maroc.
Cette complémentarité est essentielle pour assurer la stabilité du réseau électrique et offrir la flexibilité nécessaire à l’intégration des énergies intermittentes. Le Maroc pourrait également se positionner comme un futur hub de gaz naturel liquéfié (GNL), avec des capacités de regazéification et d’exportation.
À plus long terme, la possibilité de transporter du gaz « vert » (hydrogène, biométhane) via ces infrastructures existantes représente une opportunité majeure pour la décarbonation. La capacité du Maroc à capitaliser sur ces opportunités, tout en mitigeant les risques, dépendra de la solidité de sa gouvernance, de son cadre réglementaire et de sa capacité à mobiliser des partenariats stratégiques, souligne BKGR.
Les études de faisabilité technique et environnementale, bien qu’en cours de finalisation pour certaines sections, convergent vers une estimation des coûts d’investissement totaux se situant dans une fourchette de 20 à 25 Mds de dollars.
Un tel investissement, échelonné sur plusieurs phases, représente un catalyseur économique de premier ordre, non seulement pour les pays traversés mais également pour les marchés financiers et les industries connexes.
Impact notable sur la conjoncture marocaine
Au-delà de l’investissement direct dans la construction de la section marocaine du gazoduc et des infrastructures associées (stations de compression, terminaux), le projet induira des investissements considérables dans les industries de services, la logistique, et le secteur manufacturier, avec une estimation de l’effet multiplicateur sur le PIB de l’ordre de 1,8x à 2,2x pour chaque Dollar investi dans la phase de construction.
Durant la phase de construction, le NMGP est susceptible de générer un volume substantiel d’emplois directs et indirects, avec des projections de création d’environ 50 000 emplois temporaires par an pendant la phase de pointe de la construction, et environ 5 000 emplois permanents une fois l’opérationnalisation achevée, principalement dans les domaines de l’ingénierie, de la maintenance, de la logistique et de l’administration.
Selon les estimations de BKGR, l’intégration de cette infrastructure majeure pourrait ajouter entre +0,5% et +1,0% au taux de croissance annuel du PIB marocain pendant la phase de construction (environ 5-7 ans), et maintenir une contribution stable de l’ordre de +0,2% à +0,4% une fois en exploitation, grâce aux revenus de transit et à la stimulation des activités industrielles.
Les retombées ne se limitent pas à ces chiffres directs. L’accès à une source de gaz fiable et abondante à un coût compétitif devrait stimuler le développement d’industries gourmandes en énergie (ciment, engrais, métallurgie) et favoriser la diversification du mix énergétique national, réduisant la dépendance aux combustibles importés et améliorant la sécurité énergétique du Royaume.
En agrégeant les impacts sectoriels, les projections macroéconomiques indiquent que l’intégration et l’exploitation optimisée de ces infrastructures gazières pourraient induire un gain cumulé sur le PIB marocain de l’ordre de +5% à +8% sur la période s’étalant de 2025 à 2040.
Selon la même source, ce gain résulte non seulement des investissements directs et des revenus de transit, mais aussi des effets induits sur la compétitivité industrielle, la diversification économique et la position du Maroc dans les chaînes de valeur énergétiques régionales
Vers une transition équilibrée
L’impact combiné du projet de gazoduc Nigéria-Maroc (NMGP) et de la réaffectation stratégique du Gazoduc Maghreb-Europe (GME) promet d’engendrer des effets multiplicateurs significatifs à travers l’économie marocaine. Premièrement, l’attraction d’investissements directs étrangers sera renforcée par la présence de ces infrastructures majeures.
Le Maroc deviendra ainsi une destination d’investissement encore plus attractive, notamment dans les secteurs de l’énergie, de la pétrochimie, de la logistique et de l’industrie manufacturière. Les flux d’IDE présentent un potentiel de croissance de 15% à 20% annuellement durant la période de construction du NMGP.
Deuxièmement, le développement industriel et la création de valeur ajoutée seront stimulés par la disponibilité de gaz naturel à un coût compétitif. Cela favorisera la création de nouvelles unités de production et l’expansion des industries existantes, telles que la fabrication d’engrais (phosphate), la production d’électricité à partir de gaz et le développement de pôles pétrochimiques.
L’apport en valeur ajoutée brute de ces secteurs augmenterait potentiellement de 2% à 4% par an grâce à cet effet gaz. Troisièmement, l’amélioration de la balance commerciale et la sécurité énergétique seront des bénéfices directs du NMGP.
Selon BKGR, en réduisant la dépendance du Maroc aux importations d’hydrocarbures et en diversifiant ses sources, le projet pourrait générer une économie de presque 1,5 Md de dollars par an sur les importations d’énergie, tout en augmentant les revenus de transit.
Quatrièmement, la création d’emplois qualifiés et le transfert de compétences seront favorisés par le développement de l’écosystème gazier. Au-delà des emplois directs liés à la construction et à l’exploitation, la demande de compétences techniques spécialisées augmentera, favorisant ainsi la formation professionnelle et l’employabilité des jeunes.
Enfin, le développement des infrastructures connexes, telles que les réseaux de transport, les ports (notamment NADOR WEST MED) et les zones industrielles, soutiendra ces mégaprojets.
Cela va, par ricochet, avoir un effet d’entraînement positif sur l’ensemble du tissu économique national, soutient BKGR.
De plus, la stabilité des prix de l’énergie pour l’industrie nationale, assurée par des approvisionnements diversifiés et sécurisés, renforcera la compétitivité des exportations marocaines et encouragera la relocalisation de certaines productions industrielles sur le territoire.
Ainsi, le Maroc pourrait affirmer son statut de puissance régionale émergente, ancrée dans une stratégie énergétique proactive et visionnaire.
